Utilisés en France depuis les années 50, les portraits-robots sont utilisés pour aider les enquêteurs à retrouver les auteurs de crimes ou d’infractions graves. Bien que jugés peu fiables, ils constituent un élément d’enquête qui peut aider les gendarmes et les policiers à confondre un suspect.
Auparavant, les portraitistes dessinaient à la main les portraits-robots, en se basant sur les dires des témoins et des victimes. L’évolution de la technologie a permis la création de logiciels et d’outils informatiques, qui permettent à un portraitiste d’élaborer un portrait-robot à partir d’une base de données, en attendant la révolution de l’identification criminelle avec l’aide de l’ADN et de l’IA.
1. Qui a inventé le 1er portrait robot et depuis quand existe-t-il ?
2. Création moderne avec un Portraitiste Robot
3. L’ADN, le futur des portraits-robots ?
1. Qui a inventé le 1er portrait robot et depuis quand existe-t-il ?
C’est en Angleterre, que les premiers portraits-robots voient le jour, bien avant leur apparition en France. Ils portent le nom de « identikit ».
On en retrouve des traces dès la fin du XIXème siècle. En 1881, la célèbre Scotland Yard décide de diffuser un avis de recherche accompagné d’un croquis représentant un homme suspecté de meurtre.
En France, en 1882, Alphonse Bertillon invente le signalement anthropométrique, dans le but d’identifier les récidivistes. Il consiste à créer une fiche signalétique pour chaque personne mise sous écrou. Cette fiche indique une description détaillée d’un prévenu : front, lèvres, pilosité, yeux… On appelle cette méthode le « bertillonnage ».
Le bertillonnage, bien qu’efficace, ne constitue pas réellement un portrait-robot, mais cette méthode va inspirer la création de portraits-robots que nous connaissons aujourd’hui.
Il faudra attendre 1955, pour que le premier portrait-robot soit diffusé en France. Il s’agit de celui de Robert Avril, qui fut par la suite condamné pour le meurtre de Janet Marshall, une anglaise en vacances en France.
Alors que l’enquête pour le meurtre de cette jeune femme piétine, l’inspecteur Henri Van Assche, surnommé le « Maigret du Nord » est appelé en renfort par l’un des commissaires chargé de l’enquête, le commissaire Chabot.
Van Assche se plonge dans le dossier et s’arrête sur le témoignage d’une factrice qui affirme avoir croisé un homme « bizarre avec une balafre » et une main mutilée, à proximité des lieux du crime, le jour du meurtre. Avec un physique aussi reconnaissable, le Maigret du Nord décide de créer un portrait-robot du suspect.
Il contacte l’inspecteur Emilien Paris, spécialisé dans l’identité judiciaire, pour lui confier l’élaboration du portrait. Ce dernier s’inspirera du bertillonnage, mais aussi d’un jeu de société français « Jeu des Photos-Robot » inventé par Roger Dambron, pour créer le tout premier portrait-robot diffusé en France.
Diffusé à tous les départements de police, le portrait permet de récolter des témoignages qui mèneront jusqu’à un homme : Robert Avril, condamné à de nombreuses reprises pour divers crimes et délits. Arrêté par la police en 1956, il avouera les faits et sera jugé coupable du meurtre de Janet Marshall en 1958.
Grâce à cette réussite, le portrait-robot deviendra de plus en plus utilisé par la police dans le cadre d’enquêtes difficiles.
NB : C’est grâce à une récompense obtenue au Concours Lépine de 1952, que le « Jeu des Photos-Robot » attire l’attention du préfet de police Baylot, qui conseille à Mr Dambron de rentrer en contact avec ses services. Ce qu’il fit le mois suivant. Et c’est une adaptation du nom du jeu par la police qui est à l’origine du terme « portrait-robot ».
Poussé par le succès de l’arrestation de Robert Avril, le jeu est commercialisé en 1956, et les enfants devaient reconstituer les photos des stars de l’époque comme Line Renaud, Annie Cordy, Louis Mariano ou encore Gilbert Bécaud.
2. Création moderne avec un Portraitiste Robot
De nos jours, le portrait-robot est réalisé avec un portraitiste, lors d’un entretien avec un témoin ou une victime d’agression, de séquestration, de tentative d’homicide, ou de viol.
A noter : en général, les enfants et les personnes âgées ne font pas de portraits-robots, car leurs témoignages peuvent manquer de fiabilité.
L’entretien avec le portraitiste dure environ 3 heures.
Pour constituer le portrait-robot, il faut partir d’un schéma neutre. Démarrer avec un visage pré-établit pourrait influencer le témoignage du témoin / de la victime. Même la pièce dans laquelle se déroule l’entretien doit être la plus neutre possible et ne pas contenir de distractions : pas de photos, de documentation affichée, de téléphone…
En général, le témoin ou la victime se souviennent surtout des cheveux, de la coiffure, de la couleur des yeux et de la forme du visage de l’agresseur. En s’aidant de sa base de données, le portraitiste pose des questions pour chercher à obtenir plus de détails.
Plus d’une vingtaine de traits du visage permettent de recréer le portrait du suspect : le nez, la bouche, le menton, les oreilles, le front, etc.
Le portraitiste demande à la personne de revivre la scène en tant que spectateur. Pour l’aider à se remémorer les événements, il lui pose des questions qui ne portent pas que sur l’apparence de l’agresseur, mais également sur l’environnement et ses émotions au moment des faits. Le but étant de faire resurgir les souvenirs. Est-ce qu’il faisait jour ? Cela s’est-il passé en intérieur ou en extérieur ? Quelle température faisait-il ? Etc.
Le temps joue également un rôle important dans l’élaboration d’un portrait-robot. Dans le cas d’un viol par exemple, le portrait-robot doit idéalement être réalisé entre 3 et 5 jours après les faits. Ce laps de temps permet à la mémoire de faire son travail.
Il est important de noter que l’exercice du portrait-robot peut être très difficile pour une victime. Etre replongé au cœur d’un événement traumatisant est une expérience désagréable et douloureuse.
Lorsque que le portrait-robot est finalisé, la victime doit lui attribuer une note sur 10 afin de juger la ressemblance du portrait par rapport à l’agresseur. Tous ces éléments seront conservés dans le dossier d’enquête et permettront peut-être aux enquêteurs de trouver de nouvelles pistes.
3. L’ADN, le futur des portraits-robots ?
Il existe depuis plusieurs années une sorte de portrait-robot beaucoup plus fiable (80% à 90%) et entièrement basé sur la science : le portrait-robot génétique.
Vers la fin des années 2000, des recherches de l’université des sciences appliquées de Rotterdam démontrent que l’on peut déduire certaines caractéristiques physiques grâce à l’ADN d’une personne : la couleur de peau, des yeux, des cheveux, la morphologie du visage… Toutes ces informations sont compilées dans notre ADN.
De nombreux pays, dont la France, l’Espagne, les Etats-Unis et les Pays-Bas, ont déjà décidé de mettre à profit ces découvertes dans le cadre d’enquêtes criminelles.
Des recherches sont toujours en cours, et les scientifiques espèrent, à terme, pouvoir établir un portrait-robot le plus précis grâce à l’ADN. Il prendrait en compte la forme des yeux, l’écart entre les yeux, l’âge, la corpulence, etc.
A cette fin, le consortium européen VISAGE (VISible Attributes Through GEnomics) a été créé. Il a pour objectif d’accélérer la réalisation et la mise en place de portraits robots à partir de traces biologiques.
Le consortium est composé de 13 partenaires issus d’institutions académiques, policières et judiciaires de 8 pays européens dont la France via le Service National de Police Scientifique (SNPS ex. INPS).
Couplé à l’intelligence artificielle, l’ADN pourrait permettre une identification très rapide et très fiable de suspects ou d’auteurs de crime, facilitant ainsi le travail de nos forces de l’ordre tout en amenant plus de confort aux victimes.
Sans oublié l’aide à la résolution des « cold cases », affaires judiciaires classées sans suite car non élucidées.